Analyse des Conditions de Travail au Combinat Chimique de Sibérie (SKhK) à Seversk, Russie
Résumé Exécutif
Le présent rapport détaille les conditions de travail au sein du complexe nucléaire situé à Seversk, en Sibérie (Russie), identifié comme le Combinat chimique de Sibérie (SKhK). Exploité par TVEL, une filiale de la corporation d'État russe Rosatom, le SKhK est une installation historique majeure du cycle du combustible nucléaire russe. Tenex (Techsnabexport) agit en tant qu'exportateur des produits et services issus de SKhK et d'autres sites russes, mais n'est pas l'opérateur direct de l'usine de Seversk. Les conditions de travail à SKhK sont profondément influencées par le statut de la ville de Seversk en tant qu'Entité administrative-territoriale fermée (ZATO), qui restreint l'accès, limite la transparence et façonne un environnement socio-économique unique pour les travailleurs. Officiellement, Rosatom et TVEL adhèrent aux lois russes du travail et mettent en avant des politiques de sécurité strictes, des certifications internationales et de faibles taux d'incidents récents. Cependant, cette image contraste fortement avec l'historique documenté d'accidents graves à SKhK, y compris une explosion majeure en 1993 et plusieurs incidents de criticité antérieurs. Des préoccupations environnementales persistantes, soulevées par des organisations non gouvernementales (ONG) et étayées par des études partielles, concernent la gestion des déchets radioactifs (notamment l'injection en puits profonds et le stockage potentiellement non sécurisé) et la contamination alléguée de l'environnement local, posant des risques potentiels à long terme pour les travailleurs et la population. Des études épidémiologiques sur les cohortes de travailleurs de SKhK indiquent des risques accrus pour certaines maladies (cardiovasculaires, potentiellement certains cancers) liés aux expositions professionnelles passées, bien que les résultats soient parfois complexes. Les informations spécifiques sur les conditions de travail quotidiennes actuelles (horaires précis, échelles salariales, surveillance sanitaire courante) sont rares dans le domaine public, en grande partie à cause de l'opacité inhérente au statut de ZATO et à la nature sensible des activités nucléaires. En conclusion, bien qu'un cadre formel de sécurité et de droit du travail existe, l'évaluation des conditions réelles à SKhK est entravée par un manque de transparence et un conflit entre les déclarations officielles rassurantes et un héritage documenté de risques et de préoccupations externes.
I. Introduction : Identification du Complexe Nucléaire de Seversk et des Entités Clés
L'évaluation des conditions de travail dans une installation nucléaire complexe nécessite d'abord une identification précise du site, de son histoire, de ses activités actuelles et de la structure organisationnelle qui le régit. La ville de Seversk, en Sibérie, abrite l'un des plus importants complexes nucléaires de Russie.
- A. Le Combinat Chimique de Sibérie (SKhK) : Nom Officiel, Localisation et HistoireL'installation nucléaire principale de Seversk (anciennement connue sous le nom de Tomsk-7), située dans l'Oblast de Tomsk en Russie, est officiellement le Combinat chimique de Sibérie (en russe : Сибирский химический комбинат, SKhK ; également désigné par l'acronyme anglais SCC).1 Établi en 1953, le SKhK a été conçu comme un complexe intégré unique du cycle technologique nucléaire soviétique, initialement dédié à la production de composants pour armes nucléaires à base de matières fissiles, notamment de l'uranium hautement enrichi (UHE) et du plutonium.1 Sa création s'inscrivait dans le contexte de la Guerre Froide, nécessitant un secret et une sécurité absolus autour de ces activités stratégiques, ce qui a conduit à l'implantation du complexe au sein d'une ville fermée.1Historiquement, le complexe comprenait cinq réacteurs de production de plutonium (EI-1 mis en service en 1955, EI-2 en 1958, ADE-3 en 1961, ADE-4 en 1963 et ADE-5).1 Ces réacteurs, en particulier la série ADE, produisaient également de l'énergie thermique et électrique, atteignant une capacité de production électrique de 600 MWe.1 Le site abritait également une usine de retraitement du combustible irradié, une usine d'enrichissement de l'uranium (utilisant initialement la diffusion gazeuse puis la technologie de centrifugation), une usine chimico-métallurgique pour la fabrication de composants d'armes, ainsi que d'importantes installations de stockage de matières fissiles et de déchets radioactifs.1 La fin de la Guerre Froide et les accords de désarmement nucléaire entre la Russie et les États-Unis ont entraîné un changement majeur dans la mission du SKhK. La production d'UHE a cessé, et les derniers réacteurs dédiés à la production de plutonium de qualité militaire (ADE-4 et ADE-5) ont été arrêtés définitivement en 2008.1 Tous les réacteurs du site étaient déclassés en 2023.1Malgré l'arrêt de la production militaire, SKhK demeure un site majeur pour le stockage et la manipulation de matières nucléaires utilisables à des fins militaires et de composants d'armes.1 Ses activités actuelles sont diversifiées et cruciales pour le cycle du combustible nucléaire civil russe et international. Elles comprennent l'enrichissement d'uranium faiblement enrichi (UFE) pour les centrales nucléaires (avec une capacité estimée à environ 3,0 millions d'UTS/an), la conversion d'uranium (production d'hexafluorure d'uranium, UF6, avec une capacité estimée à 12 500 tU/an), et l'enrichissement d'uranium de retraitement (URT ou RepU) pour des clients étrangers.1 Le site produit également des isotopes stables (xénon, étain, sélénium, etc.).1 Une part importante des activités actuelles concerne la recherche et le développement (R&D), notamment la fabrication expérimentale de nouveaux types de combustibles pour les réacteurs avancés, comme le combustible MOX (mélange d'oxydes d'uranium et de plutonium), le combustible MNUP (nitrure mixte uranium-plutonium) et le combustible REMIX (mélange régénéré uranium-plutonium) destinés aux réacteurs à neutrons rapides comme le futur BREST-OD-300 en construction sur le site même de SKhK.3 Enfin, SKhK est l'un des plus grands sites russes de stockage de déchets radioactifs de faible et moyenne activité, utilisant notamment la controversée méthode d'injection en puits profonds (plus de 30 millions de mètres cubes stockés selon certaines estimations).1 Le complexe continue également de fournir de la chaleur et de l'électricité à la ville de Seversk et à l'Oblast de Tomsk.2 SKhK reste donc une installation stratégique et complexe, gérant des matières sensibles, développant des technologies nucléaires d'avenir tout en faisant face aux défis posés par l'héritage de ses activités passées, notamment en matière de gestion des déchets.
- B. Structure Opérationnelle : Rôle de TVEL et RosatomLe Combinat chimique de Sibérie (SKhK) est exploité en tant que filiale de la société TVEL Fuel Company.1 TVEL est elle-même l'une des divisions majeures de la Corporation d'État pour l'énergie atomique Rosatom.1 Cette structure hiérarchique place SKhK sous le contrôle direct et dans le cadre politique de la corporation nucléaire d'État russe. TVEL est l'intégrateur industriel de Rosatom pour le cycle du combustible nucléaire, couvrant des activités allant de l'extraction d'uranium (via sa filiale ARMZ 12) jusqu'à la fabrication d'assemblages de combustible pour divers types de réacteurs.12 TVEL est également désignée comme l'organisation de base de la CEI pour la gestion du combustible nucléaire usé, des déchets radioactifs et le déclassement des installations nucléaires et radiologiquement dangereuses.27Rosatom est la société holding d'État qui supervise l'ensemble de l'industrie nucléaire russe. Cela inclut le complexe militaro-industriel, la production d'électricité nucléaire (via Rosenergoatom), l'ensemble du cycle du combustible (avec des acteurs clés comme TVEL pour la fabrication, Tenex pour l'exportation, ARMZ pour l'extraction), la flotte de brise-glaces à propulsion nucléaire, la R&D, la gestion des déchets, le déclassement, ainsi que les projets de construction de centrales nucléaires à l'étranger.1 La structure de Rosatom vise à consolider et intégrer ces diverses activités pour un contrôle stratégique et une expansion sur les marchés internationaux.
- C. Clarification du Rôle de Tenex : Le Bras Commercial InternationalIl est essentiel de clarifier le rôle de Tenex (Techsnabexport) par rapport à l'usine de Seversk. Tenex est la société de commerce international et l'exportateur désigné pour les produits et services du cycle du combustible nucléaire de Rosatom.29 Ses activités principales concernent l'exportation de produits d'uranium enrichi (EUP) et de services d'enrichissement d'uranium.29 Tenex n'exploite pas directement les usines d'enrichissement comme celle de SKhK à Seversk.29 Elle agit plutôt comme l'interface commerciale entre les installations de production de Rosatom (telles que SKhK à Seversk, UEKhK à Novouralsk, EKhZ à Zelenogorsk et AEKhK à Angarsk 9) et le marché mondial.29 Tenex gère les contrats d'exportation, la logistique des livraisons et la promotion des produits et services russes sur la scène internationale.29Fondée en 1963, Tenex est une filiale de Rosatom (intégrée via Atomenergoprom en 2007).10 Elle fournit une part significative, rapportée comme étant supérieure à un tiers, des services d'enrichissement nécessaires aux réacteurs de conception occidentale dans le monde.29 Sa longue histoire et sa part de marché considérable en font un acteur clé du marché mondial du combustible nucléaire et une source majeure de revenus en devises étrangères pour Rosatom.39 Les récentes sanctions américaines interdisant les importations d'uranium russe affectent directement les activités de Tenex et ses clients américains.14La distinction entre le producteur (SKhK, sous la direction de TVEL/Rosatom) et l'exportateur (Tenex) est fondamentale. Alors que la requête initiale de l'utilisateur pouvait suggérer une exploitation directe de l'usine de Seversk par Tenex, les informations disponibles indiquent clairement une séparation des rôles. Les conditions de travail au sein de SKhK sont principalement déterminées par les politiques et la gestion mises en œuvre par TVEL et Rosatom au niveau du site. Tenex, bien que dépendant de la production de SKhK pour ses exportations, n'a pas de contrôle opérationnel direct sur l'usine elle-même. Ses propres rapports se concentrent sur les ventes, le commerce, la logistique et la position sur le marché, et non sur les opérations internes des usines de production.29 Cette distinction est cruciale pour attribuer correctement les responsabilités et analyser les facteurs influençant les conditions de travail à Seversk.Tableau 1 : Résumé de l'Identification de l'Installation
Caractéristique |
Détail |
Nom Officiel |
Combinat chimique de Sibérie (Сибирский химический комбинат) |
Acronyme |
SKhK (ou SCC) |
Localisation |
Seversk (anciennement Tomsk-7), Oblast de Tomsk, Russie |
Date d'Établissement |
1953 (début des opérations principales) 1 |
Opérateur |
JSC Siberian Chemical Combine (filiale) |
Société Mère |
TVEL Fuel Company (division de Rosatom) 1 |
Activités Actuelles Clés |
Enrichissement UFE & URT, Conversion UF6, Stockage matières nucléaires & déchets, R&D (combustibles avancés, BREST-OD-300), Production isotopes stables, Fourniture chaleur/électricité 1 |
Exportateur Associé |
Tenex (Techsnabexport) 29 |
II. Tenex (Techsnabexport) : Profil et Positionnement Industriel
Comprendre le rôle et la réputation de Tenex est pertinent car cette entité est le visage international de l'industrie russe de l'enrichissement, y compris pour les produits issus de SKhK.
- A. Activités Principales et Position sur le Marché MondialTenex est l'un des principaux fournisseurs mondiaux de produits et services du front-end du cycle du combustible nucléaire (NFC).29 Ses activités principales incluent la fourniture d'uranium naturel et enrichi, ainsi que des services de conversion et d'enrichissement de l'uranium.29 Tenex gère les exportations provenant des quatre grandes usines d'enrichissement russes (Seversk/SKhK, Novouralsk/UEKhK, Zelenogorsk/EKhZ, Angarsk/AEKhK).9 Ces installations représentent collectivement une part très importante de la capacité mondiale d'enrichissement, estimée historiquement à près de 50%, bien que les chiffres précis puissent varier selon les sources et les années.15 Cette position dominante confère à la Russie, par l'intermédiaire de Tenex et Rosatom, une influence considérable sur le marché mondial du combustible nucléaire.Au-delà de l'enrichissement, Tenex s'est diversifiée. La société propose également des services liés au back-end du cycle du combustible, tels que la gestion du combustible nucléaire usé (SNF) et des déchets radioactifs (RAW), y compris le transport et le stockage.29 Elle assure également un soutien logistique complet pour ses livraisons.29 Plus récemment, Tenex a été désignée comme intégrateur industriel par Rosatom pour le développement de nouvelles activités, notamment dans le domaine du lithium, et a par le passé acquis des producteurs de fibre de carbone, un matériau potentiellement utilisé dans la fabrication des centrifugeuses d'enrichissement.29Tenex détient un portefeuille important de contrats à long terme avec de grandes compagnies d'électricité à travers le monde. Parmi ses clients figurent ou ont figuré des entreprises en Chine, aux Émirats Arabes Unis, en Corée du Sud, en France (EDF), et jusqu'à récemment, aux États-Unis (Constellation Energy Corp., Duke Energy Corp., Dominion Energy Inc.).29 La valeur totale de son portefeuille de commandes à long terme a été estimée à plusieurs milliards de dollars américains.29 Ces contrats soulignent la dépendance mondiale vis-à-vis des services d'enrichissement russes, rendant les efforts de diversification entrepris par les pays occidentaux particulièrement complexes et coûteux à court et moyen terme.14
- B. Réputation Rapportée : Sécurité, Fiabilité et Pratiques CommercialesDans ses communications officielles et rapports annuels, Tenex met en avant sa longue expérience (plus de 50 ans), sa fiabilité en tant que fournisseur et son adhésion aux normes internationales en matière de qualité, de sécurité, de sûreté de la chaîne d'approvisionnement (certification ISO 28000:2007 mentionnée pour sa division) et de développement durable (systèmes de management environnemental certifiés ISO 14001:2015 mentionnés pour les entreprises de sa division).29 L'entreprise souligne sa flexibilité face aux changements du marché et sa participation à des programmes internationaux historiques comme "Megatons to Megawatts", qui convertissait l'UHE russe issu d'armes démantelées en UFE pour les centrales civiles.55 Tenex participe également aux programmes d'amélioration de la gouvernance d'entreprise de Rosatom.29Concernant la sécurité opérationnelle directe de Tenex et de ses sous-traitants immédiats (probablement liés à ses activités de commerce, de logistique et administratives), le rapport 2023 de sa division indique un taux de fréquence des accidents avec arrêt de travail (LTIFR) de 0 entre 2020 et 2023, sans aucun accident ni maladie professionnelle détecté.29 Il est important de noter que ces chiffres ne s'appliquent pas nécessairement aux conditions de travail au sein des installations de production comme SKhK, qui relèvent de la responsabilité de TVEL.Cependant, la réputation de Tenex n'est pas exempte de controverses. L'entreprise a été au centre de critiques concernant l'importation en Russie d'importantes quantités d'"uranium appauvri" (résidus d'enrichissement, ou "tails") provenant d'Europe (notamment de contrats avec Urenco et Orano/Areva) à des fins de ré-enrichissement.10 Des groupes environnementaux comme Greenpeace et Bellona ont dénoncé ces pratiques, les assimilant à une importation de déchets nucléaires, et ont mis en lumière les conditions de stockage jugées précaires (conteneurs en plein air) sur les sites russes comme Seversk.23 Bien que Tenex et Rosatom aient présenté ces activités comme une valorisation de matière première secondaire 17, la pression publique a conduit à l'arrêt de certains de ces contrats vers 2009-2010 10, même si des reprises ultérieures ont été alléguées.65 Plus récemment, les tensions géopolitiques suite à l'invasion de l'Ukraine par la Russie ont conduit les États-Unis à interdire les importations d'uranium russe, ce qui a poussé Tenex à émettre des avis de force majeure à ses clients américains, soulignant l'incertitude qui pèse sur ses activités internationales.14L'analyse de la réputation de Tenex révèle ainsi une dualité. D'une part, l'entreprise projette une image de succès commercial, de fiabilité technique et d'adhésion aux standards internationaux dans ses propres opérations commerciales et logistiques.29 D'autre part, elle est intrinsèquement liée aux installations de production de Rosatom, comme SKhK, qui font l'objet d'un examen critique externe significatif en raison de leur historique d'accidents et de préoccupations environnementales persistantes.3 Bien que Tenex ne soit pas l'opérateur direct de ces usines, sa réputation et la fiabilité de ses approvisionnements dépendent entièrement de la performance et des pratiques de l'ensemble de la chaîne de production de Rosatom qu'elle représente sur le marché mondial. Les controverses directes, comme celle des "tails" d'uranium 17, et les facteurs géopolitiques 14 montrent que ses activités commerciales ne peuvent être dissociées des réalités opérationnelles et environnementales des sites de production.Tableau 2 : Profil de la Société Tenex
Caractéristique |
Détail |
Fondation |
1963 36 |
Siège Social |
Moscou, Russie 36 |
Dirigeants Clés (exemples) |
Sergey Polgorodnik (Directeur Général), Liudmila Zalimskaya (Présidente du CA) 36 (Information de 2022 ou avant) |
Société Mère |
Rosatom (via Atomenergoprom) 10 |
Services Principaux |
Exportation U naturel/enrichi, services conversion/enrichissement, gestion SNF/RAW, logistique, développement lithium 29 |
Marchés/Clients Clés (ex.) |
Chine (CNNC), EAU (ENEC), Corée du Sud (KHNP), France (EDF), anciennement USA (Constellation, Duke, Dominion) 36 |
Valeur Contrats (estimations) |
Portefeuille commandes long terme estimé à ~16 milliards USD (2023) 29, ~23 milliards USD (fin 2014) 39 |
Conformité/Normes Déclarées |
ISO 28000 (sécurité chaîne appro.), ISO 14001 (environnement) - pour la division 29; adhésion politiques Rosatom 29 |
Controverses/Enjeux Clés |
Importation/stockage "tails" uranium appauvri 10; Impact sanctions US/UE 14; Dépendance Occidentale 50 |
III. Seversk : Vie et Travail dans une Entité Administrative-Territoriale Fermée (ZATO)
Le contexte géographique et administratif de Seversk est indissociable de l'analyse des conditions de travail au SKhK. Le statut de "ville fermée" (ZATO) impose des contraintes et crée une réalité sociale particulière.
- A. Contexte Historique et Raisons du Statut FerméSeversk, connue sous les noms de code Tomsk-7 ou encore Pyaty Pochtovy ("Le Cinquième Postal") pendant l'ère soviétique, a été spécifiquement fondée entre 1949 et 1953 pour héberger le complexe nucléaire SKhK, alors secret et dédié au programme d'armement nucléaire soviétique.1 Sa création répondait à l'impératif de la Guerre Froide d'assurer un secret et une sécurité maximum autour des activités militaro-nucléaires jugées hautement sensibles.41Les ZATO (en russe : Закрытое административно-территориальное образование) sont des localités dont l'accès et la résidence sont restreints en raison de la présence d'installations militaires, nucléaires ou scientifiques sensibles.7 Ce système est un héritage direct de l'Union Soviétique, conçu pour protéger les secrets d'État et contrôler étroitement les populations impliquées dans des travaux stratégiques. La Russie maintient aujourd'hui un nombre important de ZATO (estimé à 44 publiquement reconnues, plus potentiellement 15 non divulguées), dont beaucoup sont gérées par Rosatom ou le Ministère de la Défense.41
- B. Implications du Statut de ZATO : Accès, Secret et Contrôle de l'InformationLe statut de ZATO a des conséquences directes et profondes sur la vie quotidienne et la transparence. L'accès à Seversk est strictement contrôlé. Un permis spécial est nécessaire même pour les citoyens russes qui n'y résident pas, et les restrictions sont encore plus importantes pour les étrangers.7 Historiquement, ces villes étaient souvent absentes des cartes géographiques publiques et entourées de périmètres de sécurité physiques (barbelés, tours de guet, points de contrôle).68 Cet isolement physique et informationnel limite intrinsèquement la transparence et la surveillance externe des activités menées à l'intérieur de la ville, y compris celles du SKhK et les conditions de travail qui y prévalent. Par exemple, il a été rapporté que la participation d'observateurs extérieurs à des auditions publiques concernant les activités de SKhK était rendue difficile, voire impossible, en raison des délais et des exigences pour obtenir les permis d'accès nécessaires.23Les résidents eux-mêmes étaient soumis à des règles strictes. Ils devaient obtenir des autorisations spéciales pour voyager à l'extérieur de la ville et étaient tenus de ne pas divulguer leur lieu de résidence.7 Une habilitation de sécurité, délivrée par les organes compétents (comme le KGB à l'époque soviétique), était nécessaire pour s'installer dans une ZATO.70 Cela a contribué à instaurer une culture du secret et de l'autocensure 68, qui peut potentiellement entraver la circulation de l'information sur d'éventuels problèmes ou préoccupations, y compris ceux liés au travail, et affecter la volonté des travailleurs de signaler des problèmes à des instances extérieures.Bien que certaines ZATO aient cherché à s'ouvrir économiquement après la dissolution de l'URSS, beaucoup, comme Seversk, conservent leur statut fermé en raison de l'importance stratégique continue de leurs installations et des préoccupations de sécurité nationale.41 Seversk reste fermée spécifiquement en raison des activités nucléaires en cours au SKhK.7 Les tensions géopolitiques actuelles pourraient même renforcer la justification du maintien de ce statut.41 La persistance du statut fermé de Seversk suggère que la sécurité et le secret demeurent des priorités absolues, primant probablement sur les considérations de transparence concernant les opérations et les conditions de vie et de travail à l'intérieur.
- C. Conditions de Vie Rapportées : Privilèges Passés vs. Réalités ActuellesHistoriquement, vivre et travailler dans une ZATO offrait des avantages matériels significatifs par rapport au reste de l'Union Soviétique. Les résidents bénéficiaient souvent de logements de meilleure qualité, de magasins mieux approvisionnés, de bonnes écoles, de meilleurs services de santé et de primes salariales.7 Ces privilèges visaient à compenser l'isolement géographique, les restrictions de liberté et les risques inhérents au travail dans des installations sensibles, tout en favorisant la loyauté et l'acceptation des contraintes.7Cependant, les transitions post-soviétiques ont apporté des défis économiques à de nombreuses ZATO. Des problèmes de financement fédéral (dont elles dépendent fortement 74), des retards ou non-paiements de salaires (y compris pour les travailleurs du nucléaire, soulevant des préoccupations de sécurité 71), et la nécessité d'une diversification économique suite à la réduction des commandes militaires sont apparus.71 L'arrêt des réacteurs de production de plutonium à SKhK, par exemple, a entraîné des suppressions d'emplois, nécessitant des efforts de reconversion et de reclassement pour les travailleurs concernés.10 Si certaines ZATO ont réussi leur transition grâce à leur capital humain et au soutien continu de l'État 69, d'autres font face à des difficultés pour adapter des installations ou des économies devenues obsolètes.41 Les privilèges matériels du passé ne reflètent donc pas nécessairement la réalité socio-économique actuelle à Seversk, bien que le statut ZATO puisse encore conférer certains avantages par rapport aux villes ouvertes environnantes.Le statut de ZATO crée un environnement paradoxal. Il a historiquement offert des privilèges matériels et un sentiment de sécurité et d'importance 7 en échange d'un isolement strict, du secret et d'une liberté restreinte.7 L'État avait besoin d'attirer et de retenir une main-d'œuvre qualifiée pour des tâches critiques, souvent dangereuses et secrètes 41, et les conditions de vie supérieures compensaient ces contraintes.7 L'isolement physique et informationnel servait l'objectif premier de sécurité.68 Les changements économiques post-soviétiques et les restructurations industrielles (comme l'arrêt des réacteurs 10) ont potentiellement érodé certains de ces privilèges et créé de nouvelles incertitudes quant à l'emploi et à l'avenir.71 L'évaluation des conditions de travail à SKhK doit tenir compte de ce contexte socio-économique unique. La perception des risques, des avantages et des droits par les travailleurs peut différer de celle observée dans des environnements industriels "ouverts". La structure même de la ZATO limite la visibilité extérieure sur la vie et le travail quotidiens, rendant toute évaluation fortement dépendante de preuves indirectes ou de sources internes potentiellement biaisées. Le "pacte" historique (privilèges contre secret) pourrait encore influencer les attitudes actuelles des travailleurs et leur propension à communiquer sur leurs conditions.Tableau 3 : Caractéristiques des ZATO et Implications
Catégorie |
Caractéristiques Clés |
Implications pour les Travailleurs |
Implications pour le Reporting/Surveillance |
Statut ZATO |
Accès restreint, Culture du secret, Historique de privilèges matériels, Dépendance du financement fédéral 41 |
Contrôle de l'information, Isolement potentiel, Avantages passés vs réalités économiques actuelles, Culture de sécurité prégnante |
Opacité, Difficulté de vérification indépendante, Accès externe limité (journalistes, ONG, chercheurs), Filtrage potentiel de l'information |
Environnement |
Isolement géographique fréquent, Proximité d'installations sensibles/dangereuses 41 |
Exposition potentielle aux risques (radiologiques, chimiques), Isolement social/professionnel |
Difficulté d'évaluation environnementale indépendante, Dépendance des données officielles ou des lanceurs d'alerte |
Gouvernance |
Administration souvent liée à Rosatom/Ministère Défense, Influence fédérale forte 41 |
Moins d'autonomie locale potentielle, Alignement sur les priorités de l'État/corporation |
Moins de contre-pouvoirs locaux?, Accès limité aux processus décisionnels locaux |
IV. Conditions de Travail au Combinat Chimique de Sibérie (SKhK)
L'analyse des conditions de travail spécifiques au SKhK doit intégrer les aspects de sécurité (radiologique et industrielle), la structure du travail et la rémunération, ainsi que les risques et impacts sur la santé des travailleurs, tout en tenant compte du contexte ZATO et des informations disponibles.
- A. Protocoles et Gestion de la Sécurité
- Position Officielle :Rosatom et ses filiales, y compris TVEL qui exploite SKhK, affirment publiquement adhérer à des normes de sécurité rigoureuses.31 Celles-ci s'appuient sur la législation fédérale russe, notamment la loi "Sur l'utilisation de l'énergie atomique", ainsi que sur des politiques internes à l'échelle de l'industrie, comme la "Politique unifiée de l'industrie en matière de sécurité et de santé au travail".29 Les rapports de Tenex et TVEL mentionnent également l'alignement sur des normes internationales, avec des certifications comme ISO 14001 pour le management environnemental et ISO 28000 pour la sécurité de la chaîne d'approvisionnement (bien que ces certifications soient mentionnées pour la division Tenex, leur applicabilité directe à SKhK n'est pas confirmée dans les extraits).29 Toutes les opérations impliquant des matières nucléaires nécessitent des licences délivrées par l'autorité de sûreté russe, Rostekhnadzor.29 Officiellement, la sécurité est présentée comme une priorité absolue, gérée via un système structuré et multi-niveaux.31Des programmes spécifiques sont en place pour gérer les risques inhérents aux activités nucléaires. Cela inclut des programmes détaillés de radioprotection pour le transport et la manipulation des matières radioactives 42, des plans de préparation et d'intervention en cas d'urgence 29, des systèmes de gestion de la sécurité des déchets radioactifs 30 et des programmes pour le déclassement sécurisé des installations en fin de vie.12 La formation du personnel à la culture de sécurité, à la santé au travail et aux premiers secours est également rapportée comme étant obligatoire et régulière.29En termes de performance récente, les rapports officiels des entités liées suggèrent de bons résultats. Le rapport 2023 de la division Tenex revendique un LTIFR de 0 pour ses propres organisations et sous-traitants entre 2020 et 2023, sans maladies professionnelles ni accidents sur son installation industrielle dangereuse.29 TVEL a rapporté un LTIFR bas (0,05 en 2021) pour l'ensemble de sa division.27 Une source mentionne même que des clients finlandais auraient exprimé leur satisfaction quant aux normes HSE (Hygiène, Sécurité, Environnement) observées lors de visites à SKhK.33 Cependant, il faut souligner que ces rapports agrégés ou spécifiques à d'autres entités ne reflètent pas nécessairement la situation précise et actuelle sur les lignes de production de SKhK et ne tiennent pas compte de l'historique du site.
- Radioprotection :La gestion des risques radiologiques est un élément central de la sécurité à SKhK. Les opérations sont encadrées par des licences et des programmes de radioprotection spécifiques.29 Des systèmes de contrôle et de comptabilité des matières nucléaires (MPC&A) ont été mis en place et renforcés, en partie grâce à une coopération internationale avec les États-Unis (programme DOE/NNSA Lab-to-Lab), visant à améliorer la sécurité physique, le contrôle et la comptabilité des matières fissiles.2 Ces programmes incluent l'installation de portiques de détection de radiation, l'utilisation de scellés d'inviolabilité et de systèmes de comptabilité informatisés.77Pour le suivi des travailleurs, des systèmes de dosimétrie existent. Les études épidémiologiques menées sur les cohortes de SKhK utilisent des données historiques de dosimétrie externe (exposition gamma) et des données de biosurveillance (pour estimer l'exposition interne à l'uranium, par exemple) afin d'évaluer les doses cumulées reçues par les travailleurs au fil du temps.78 L'existence de ces données est essentielle pour la recherche sur les risques sanitaires, bien que la complétude et la précision des données historiques puissent toujours être sujettes à caution.
- Pratiques de Sécurité Industrielle :Au-delà des risques radiologiques, les politiques de Rosatom/TVEL couvrent également la sécurité et la santé au travail en général.29 Les exigences incluent des évaluations des risques, des formations à la sécurité et la mise en place d'espaces de travail ergonomiques.35 Des procédures spécifiques existent pour la manipulation de produits chimiques dangereux comme l'UF6, y compris des systèmes conçus pour neutraliser les rejets accidentels (utilisant des absorbeurs chimiques).82 On peut donc s'attendre à ce que des procédures de sécurité industrielle standard soient en place, en complément des mesures spécifiques au nucléaire.
- Lacunes et Préoccupations Rapportées :Malgré le cadre officiel, des préoccupations importantes subsistent, principalement soulevées par des ONG et des observateurs externes. La gestion des déchets radioactifs à SKhK est une source majeure de critiques persistantes. Des pratiques comme l'injection de déchets liquides en couches géologiques profondes, le stockage en bassins ouverts ("pulp form storage"), et le stockage en plein air de conteneurs d'UF6 (notamment les "tails" issus de contrats de retraitement étrangers) sont dénoncées comme potentiellement dangereuses et sources de contamination.2 Des allégations de fuites depuis les installations de stockage et de contamination des eaux de surface (rivière Tom) et souterraines ont été rapportées, étayées par certaines études montrant des niveaux élevés de radionucléides (Pu, Cs-137) dans l'environnement local.5 Les risques d'inondation dans la région soulèvent également des questions sur l'intégrité à long terme des sites de stockage.24 Ces préoccupations environnementales se traduisent directement en risques potentiels d'exposition chronique pour les travailleurs présents sur le site et pour les populations avoisinantes, contrastant avec les discours officiels sur une gestion sûre des déchets.L'analyse historique des accidents de criticité survenus à SKhK et sur d'autres sites nucléaires russes pointe souvent des causes profondes liées à une conception inadéquate (absence d'équipements géométriquement sûrs pour prévenir la criticité) et à des erreurs humaines ou des violations de procédures.83 Bien que des améliorations aient pu être apportées, ces incidents passés suggèrent des faiblesses potentielles dans la culture de sécurité ou les pratiques d'ingénierie, et soulèvent la question de savoir si ces problèmes fondamentaux ont été entièrement résolus. L'enquête sur l'accident de 1993 a évoqué des défaillances techniques potentielles (manque d'air comprimé conduisant à une surchauffe 5), et l'ampleur des opérations de décontamination nécessaires 5 ainsi que des suggestions de fuites antérieures non signalées 5 illustrent la gravité potentielle des défaillances.Il existe donc un contraste marqué entre les affirmations officielles sur les normes de sécurité élevées, les certifications et les faibles taux d'incidents récents 27, et l'historique documenté d'accidents graves 5 ainsi que les préoccupations environnementales continues soulevées par des sources externes.3 Les rapports officiels peuvent se concentrer sur des indicateurs globaux ou des périodes récentes, minimisant potentiellement les problèmes historiques ou spécifiques à certaines zones de production au sein du vaste complexe de SKhK. L'héritage des pratiques passées (gestion des déchets, conception d'anciennes installations 84) crée des risques persistants. Les rapports des ONG fournissent une perspective critique externe essentielle, soulignant les écarts potentiels entre les déclarations officielles et la réalité sur le terrain, en particulier concernant les impacts environnementaux qui affectent aussi la sécurité des travailleurs. Le statut de ZATO entrave la vérification indépendante des affirmations des deux côtés. Une évaluation équilibrée doit reconnaître à la fois le cadre de sécurité officiel et les performances revendiquées, ainsi que les risques historiques significatifs et les préoccupations externes persistantes. Cela suggère que si la sécurité procédurale est peut-être mise en avant, les problèmes hérités et les lacunes potentielles, notamment dans la gestion des déchets, restent des facteurs de risque critiques pour les travailleurs.
- B. Structure du Travail et Rémunération
- Cadre Général du Droit du Travail Russe :Les travailleurs de SKhK sont soumis au Code du travail de la Fédération de Russie. Celui-ci établit une durée légale du travail de 40 heures par semaine, limite les heures supplémentaires (maximum 120 heures par an, avec compensation majorée), garantit un congé annuel payé d'au moins 28 jours calendaires (pouvant être augmenté pour les travaux dangereux ou dans les régions nordiques), ainsi que des congés maladie payés et des congés maternité/paternité (pouvant s'étendre jusqu'à trois ans pour la garde d'enfant).34 La loi exige des contrats de travail écrits détaillant les fonctions, les indicateurs de performance et la rémunération (versée au moins deux fois par mois).81 Elle interdit également la discrimination fondée sur divers motifs (sexe, ethnie, religion, etc.) et encadre strictement les motifs de licenciement.81 Rosatom et TVEL affirment se conformer à ce Code du travail.34
- Informations Rapportées sur les Horaires et Systèmes de Rotation :Les informations spécifiques sur les horaires de travail typiques ou les systèmes de rotation en vigueur dans les usines d'enrichissement ou les autres installations de production de SKhK sont absentes des extraits consultés. TVEL mentionne dans un rapport que la "grande majorité" (plus de 98%) des employés de ses filiales travaillent sous contrat à durée indéterminée et selon des horaires normaux (40 heures/semaine).34 Cependant, il s'agit d'une déclaration générale pour l'ensemble de la division Fuel Company et ne fournit pas de détails pour SKhK. Étant donné la nature des opérations industrielles (enrichissement, conversion, etc.), qui fonctionnent souvent en continu (24/7), il est très probable que des systèmes de travail posté (shifts) soient en place, mais les détails précis (durée des postes, rotations, etc.) constituent une lacune importante dans les données disponibles.
- Rémunération et Avantages Sociaux :Historiquement, les travailleurs des ZATO bénéficiaient de primes salariales pour compenser les contraintes 70, et les salaires y étaient généralement plus élevés que la moyenne russe.73 Cependant, la période post-soviétique a vu émerger des problèmes de paiement des salaires dans certaines ZATO 71, bien que la situation actuelle à SKhK ne soit pas clairement documentée. Rosatom et TVEL mentionnent l'existence d'outils d'incitation, d'un soutien social basé sur des conventions collectives et l'adhésion aux politiques sociales de l'industrie.34 Les employeurs russes sont tenus de verser des cotisations importantes (environ 30% du salaire brut) aux fonds sociaux de l'État (retraite, médical, chômage).81 Il est probable que la rémunération à SKhK suive les grilles et structures définies par TVEL/Rosatom, mais les niveaux spécifiques ne sont pas détaillés. Les avantages sociaux pourraient inclure ceux typiques des grandes entreprises d'État russes, potentiellement complétés par des avantages liés au statut de ZATO (logement, services spécifiques), mais cela reste à confirmer. Le contexte historique de rémunération plus élevée pourrait encore influencer les attentes ou les réalités actuelles, mais des données concrètes font défaut.
- C. Santé et Risques Professionnels
- Études Sanitaires Documentées :Plusieurs études épidémiologiques ont été menées spécifiquement sur les cohortes de travailleurs de SKhK, en se concentrant sur les effets à long terme des expositions professionnelles, notamment aux rayonnements ionisants et aux composés d'uranium.78 Ces recherches s'appuient sur le Registre médical et dosimétrique régional géré par le Centre de recherche biophysique de Seversk (SBR Center), qui contient des données sur environ 65 000 employés actuels et anciens de SKhK depuis sa création.79 Cela témoigne de l'existence d'une infrastructure de recherche dédiée au suivi sanitaire des travailleurs du site.Ces études rapportent des estimations de doses cumulées. Par exemple, une description de cohorte mentionne une dose gamma externe cumulée moyenne de 28,3 millisieverts (mSv) 79, tandis qu'une autre étude sur des travailleurs exposés à l'uranium rapporte une dose externe moyenne de 11,12 milligrays (mGy) et des doses internes estimées (variables selon les modèles) pour les poumons et le foie.79 Les études confirment que les travailleurs, en particulier ceux des usines radiochimique, de plutonium, de sublimation et d'enrichissement, ont été exposés à une combinaison de rayonnements externes et internes, l'uranium étant une source majeure d'exposition interne pour certains groupes.79Concernant les effets sur la santé, les résultats sont parfois nuancés. Certaines études ont trouvé des associations statistiquement significatives entre l'exposition aux rayonnements et un risque accru de maladies cardiovasculaires, notamment l'infarctus du myocarde.79 Pour les cancers, les résultats sont moins tranchés : une étude a noté un risque potentiellement plus élevé de mortalité par cancer de la prostate et du poumon chez les travailleurs ayant reçu des doses externes supérieures à 50 mGy, mais ces associations étaient basées sur peu de cas et devenaient non significatives après ajustement pour le tabagisme, un facteur de confusion majeur.79 D'autres analyses rapportées par le SBR Center concluent à l'absence d'augmentation globale du risque de cancer dans la gamme des "faibles" doses.79 La recherche se poursuit pour affiner ces analyses de risque. Il existe donc des preuves scientifiques liant les expositions professionnelles passées à SKhK à certains risques sanitaires à long terme, bien que l'ampleur exacte de ces risques et les relations de cause à effet fassent encore l'objet d'études.
- Impacts Sanitaires et Maladies Professionnelles Rapportés :Les accidents historiques ont eu des conséquences sanitaires immédiates et graves. Les incidents de criticité ont entraîné des doses de radiation aiguës élevées pour les travailleurs impliqués (par exemple, 200 rem pour un travailleur lors de l'accident de 1961 à SKhK 86; des doses significatives mais non quantifiées dans les extraits pour l'accident de 1978 84). L'explosion de 1993 a exposé les travailleurs présents sur le site et potentiellement les populations environnantes à des rejets de matières radioactives.3Au-delà des accidents, les opérations de routine impliquent une exposition chronique potentielle à divers risques. Les dangers radiologiques proviennent de l'uranium (sous diverses formes chimiques), du plutonium (dans les anciennes activités et la R&D actuelle), et d'autres radionucléides issus du retraitement.5 S'y ajoutent des risques chimiques, notamment liés à la manipulation de l'hexafluorure d'uranium (UF6), qui est chimiquement toxique en plus d'être radioactif.23 La gestion de ces expositions chroniques de faible niveau est au cœur des programmes de radioprotection et fait l'objet des études sanitaires à long terme.78 Les rapports officiels récents de la division Tenex ne signalent aucune maladie professionnelle détectée 29, mais des données spécifiques et actuelles sur l'incidence des maladies professionnelles parmi les travailleurs de production de SKhK ne sont pas disponibles dans les documents consultés.
- Facteurs Psychosociaux dans un Environnement de Haute Sécurité :Bien que non explicitement détaillés dans les extraits, il est raisonnable de supposer que travailler dans un environnement de haute sécurité, isolé au sein d'une ZATO, et manipulant des matières dangereuses, engendre des facteurs de stress psychosociaux spécifiques. Ceux-ci peuvent inclure la pression liée au respect des règles de sécurité et de secret, l'anxiété face aux risques potentiels, l'isolement social ou professionnel, et la surveillance constante. L'accent mis sur la "culture de sécurité" dans les programmes de formation de TVEL 34 suggère une prise de conscience des aspects comportementaux et psychologiques de la sécurité, mais l'impact réel sur le bien-être des travailleurs n'est pas documenté ici. Ces facteurs font néanmoins partie intégrante des conditions de travail globales.
L'analyse des informations disponibles révèle une asymétrie notable. D'un côté, une documentation abondante existe sur le rôle stratégique de SKhK (production de matières nucléaires, R&D, gestion des déchets 1), sur les incidents historiques majeurs 11, et sur les politiques générales de l'entreprise (sécurité, RH 29). De l'autre côté, il y a un manque relatif de détails granulaires sur les conditions de travail quotidiennes actuelles pour l'employé moyen de SKhK (horaires spécifiques, échelles salariales précises, résultats actuels de la surveillance médicale au-delà des études de cohortes à long terme). Cette asymétrie s'explique probablement par l'intérêt stratégique et international porté aux activités du site, par les limitations inhérentes au statut de ZATO qui restreint la diffusion d'informations internes détaillées, et par la nature même des rapports d'entreprise qui privilégient souvent les données agrégées et les déclarations politiques. Les études sanitaires, quant à elles, se concentrent logiquement sur les effets à long terme des expositions passées. Par conséquent, l'évaluation des conditions de travail actuelles est contrainte par cette disponibilité inégale de l'information. Si le cadre légal et politique existe, sa mise en œuvre spécifique et l'expérience vécue par les travailleurs de SKhK restent largement opaques sur la base des documents fournis. Les conclusions sur les conditions actuelles doivent donc être formulées avec prudence.Tableau 4 : Résumé des Études Sanitaires sur les Travailleurs de SKhK
Focus/Cohorte Étudiée (Exemples) |
Période Couverte (Exemple) |
Expositions Clés Étudiées |
Issues Sanitaires Principales Étudiées |
Principaux Résultats/Estimations de Risque (Exemples) |
Source(s) (Exemple) |
Travailleurs exposés aux composés d'uranium |
1953–2000 |
Uranium (interne), Rayonnement externe gamma |
Incidence/mortalité cancer |
Cohorte de 1484 travailleurs créée pour études futures. |
80 |
Cohorte générale travailleurs SKhK (SBR Center) |
1950–2013 |
Rayonnement externe gamma, Exposition interne |
Mortalité, Incidence cancer, MCV |
Dose externe moyenne 28.3 mSv; Données biosurveillance pour ~4000 travailleurs; Risque accru d'infarctus; Pas d'augmentation risque global cancer. |
79 |
Travailleurs usines principales (Mayak - Comparaison) |
1948-1982 |
Rayonnement externe gamma |
Cancer colorectal |
Tendance non monotone de l'incidence; nécessité d'analyse multifacteurs. |
80 |
Travailleurs exposés U (affinage/traitement) |
Diverses périodes |
Uranium, Rayonnements externes, Radon |
Cancer poumon, MNR, Maladies rénales |
Risque accru cancer poumon/MNR lié radon; Risque cancer prostate/poumon lié dose externe >50mGy (peu de cas, confusion tabac). |
79 |
V. Bilan de Sécurité, Incidents et Surveillance Externe
L'évaluation des conditions de travail passe aussi par l'examen du bilan de sécurité historique de l'installation, des mécanismes de surveillance et de la manière dont l'information circule.
- A. Accidents et Incidents Historiques à SKhKLe bilan de sécurité de SKhK est marqué par plusieurs événements notables. L'accident le plus grave et le mieux documenté est survenu le 6 avril 1993 à l'usine de retraitement (Usine Radiochimique).3 Une explosion chimique s'est produite dans une cuve contenant de l'acide nitrique, de l'uranium et du plutonium lors d'une opération de séparation. L'explosion a détruit une partie du bâtiment, provoqué un incendie et rejeté un nuage radioactif contenant environ 250 m³ de gaz, 8,7 kg d'uranium et 500 g de plutonium dans l'environnement.5 La contamination radioactive a touché sévèrement les environs immédiats de l'usine (1 500 m²) et s'est étendue sous forme de panache sur une zone d'environ 120 km², affectant notamment les villages de Georgievka et Nadezhda par des retombées (neige radioactive).5 L'accident a été classé au niveau 4 sur l'échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques (INES).5 Les causes exactes restent débattues, mais un manque d'air comprimé entraînant une surchauffe et une réaction incontrôlée est souvent évoqué.5 D'importantes opérations de nettoyage et de décontamination ont été nécessaires par la suite.22Avant cet événement majeur, SKhK, comme d'autres sites nucléaires soviétiques (notamment Mayak), a connu plusieurs accidents de criticité, c'est-à-dire des réactions nucléaires en chaîne auto-entretenues non contrôlées, lors de la manipulation de matières fissiles.83 Deux incidents spécifiques à SKhK sont mentionnés dans les sources : l'un le 14 août 1961, impliquant de l'uranium (probablement une solution ou une poudre), qui a entraîné une dose de 200 rem (soit 2 Sieverts) pour un travailleur 86; l'autre le 13 décembre 1978, dont les détails sur les doses reçues ne sont pas précisés dans les extraits disponibles.84 Les analyses rétrospectives de ces accidents pointent souvent des défaillances de conception (utilisation d'équipements non "géométriquement sûrs") et des erreurs humaines ou des violations des procédures comme causes principales.83Des sources non gouvernementales (ONG) affirment qu'une trentaine d'accidents majeurs se seraient produits au cours de l'histoire de SKhK, entraînant des rejets chroniques, notamment environ 10 grammes de plutonium par an dans l'atmosphère.5 Un incident plus récent et mineur (brûlures aux mains d'un employé) a été signalé en 2015 en lien avec une nouvelle installation.21 Le risque de rejets accidentels d'UF6 lors des opérations d'enrichissement ou de conversion est également reconnu, et des systèmes spécifiques de neutralisation sont prévus pour y faire face.82 Ces allégations externes suggèrent une fréquence d'incidents potentiellement plus élevée que ce qui est officiellement reconnu ou détaillé, indiquant des risques opérationnels persistants.
- B. Préoccupations Environnementales : Gestion des Déchets et Contamination RapportéeLa gestion des déchets radioactifs générés par des décennies d'activités militaires et civiles à SKhK constitue une préoccupation environnementale majeure et un facteur de risque potentiel pour les travailleurs et l'environnement. SKhK est l'un des plus grands sites russes pour le stockage de déchets de faible et moyenne activité.1 Une part importante de ces déchets, notamment liquides, a été éliminée par injection en couches géologiques profondes, une pratique très controversée.2 Plus de 30 millions de mètres cubes de déchets auraient été injectés de cette manière.1 Le stockage de déchets sous forme de "pulpes" dans des bassins ouverts est également mentionné.23Des ONG comme Bellona et Greenpeace ont régulièrement dénoncé ces pratiques et signalé des problèmes potentiels de fuites depuis les installations de stockage.3 Elles ont également critiqué le stockage en plein air de milliers de conteneurs d'hexafluorure d'uranium appauvri ("tails"), notamment ceux provenant de contrats de retraitement avec des entreprises étrangères (françaises et allemandes), jugeant ces conditions précaires.17 Des allégations récurrentes font état d'une contamination de la rivière Tom, qui borde le site, ainsi que des sols et des eaux souterraines environnantes.3 Certaines études indépendantes ou rapports ont corroboré ces craintes en détectant des niveaux élevés de plutonium et de césium-137 dans des échantillons de sol et d'eau, suggérant des fuites ou une dispersion de la contamination.5 La localisation du site dans une plaine inondable soulève également des inquiétudes quant à l'intégrité des sites de stockage en cas de crues importantes de la rivière Tom.24 La contamination potentielle de la Tom soulève même des questions sur un possible transport de radionucléides vers l'Océan Arctique via le fleuve Ob dont la Tom est un affluent.24Les conséquences de la contamination ont fait l'objet d'actions en justice. Des habitants des villages affectés par l'accident de 1993, comme Georgievka, ont poursuivi SKhK pour obtenir réparation des dommages subis du fait de la contamination et des pratiques de rejet de déchets.3 Les tribunaux ont reconnu la réalité de la contamination et le préjudice moral subi, et ont condamné l'entreprise à verser des indemnités, bien que les montants rapportés aient été jugés faibles par les plaignants et les observateurs (environ 850 USD par plaignant dans un cas).3 Ces actions légales confirment l'existence d'impacts environnementaux et sanitaires reconnus liés aux activités de SKhK.
- C. Rôle des Organismes Internationaux (AIEA)L'Agence Internationale de l'Énergie Atomique (AIEA) a joué un rôle ponctuel mais significatif à Seversk. Suite à l'accident de 1993, le gouvernement russe a sollicité l'aide de l'AIEA pour évaluer les conséquences radiologiques. Une mission d'experts de l'AIEA s'est rendue rapidement sur place (une semaine après l'accident) et a eu accès au complexe de Tomsk-7, y compris à proximité de l'installation endommagée et aux laboratoires de surveillance environnementale.85 Cela démontre une forme de coopération internationale en cas d'incident majeur.Par ailleurs, les activités de SKhK s'inscrivent dans le cadre plus large des normes et recommandations de l'AIEA. L'Agence établit des normes de sûreté pour le transport des matières radioactives, comme l'UF6 transporté dans des cylindres de type 48X utilisés par SKhK.76 Elle fournit également des cadres pour la sûreté de la gestion du combustible usé et des déchets radioactifs (via la Convention Commune, à laquelle la Russie est partie et pour laquelle elle soumet des rapports nationaux 42) et pour la gestion de l'uranium de retraitement (RepU).92L'implication de l'AIEA concerne aussi les garanties (safeguards) visant à assurer l'utilisation pacifique des matières nucléaires. Des discussions sur l'application des garanties ont eu lieu pour d'autres centres d'enrichissement russes comme Angarsk.10 La Russie déclare annuellement ses stocks de plutonium civil à l'AIEA.43 Cependant, l'application directe et continue des garanties de l'AIEA à l'ensemble des installations de SKhK, notamment celles liées à l'enrichissement ou au stockage de matières potentiellement utilisables à des fins militaires, est moins claire et probablement limitée. L'engagement international à SKhK semble s'être surtout manifesté dans le cadre de la coopération bilatérale russo-américaine sur le contrôle et la comptabilité des matières nucléaires (MPC&A) 2, axée sur la non-prolifération, plutôt que sur une surveillance exhaustive des conditions de travail ou de la sûreté opérationnelle générale par l'AIEA.
- D. Couverture Média et Informations du Domaine PublicL'information concernant SKhK provient d'une mosaïque de sources aux perspectives et niveaux de fiabilité variables. Les sources officielles incluent les rapports annuels et communiqués de Rosatom, TVEL et Tenex.27 Ces documents mettent généralement l'accent sur les succès commerciaux, la conformité réglementaire et les politiques de sécurité. Les publications académiques et scientifiques fournissent des analyses techniques, historiques ou épidémiologiques spécifiques.8 Les rapports d'ONG (Bellona, Greenpeace, NTI, FAS, WISE Uranium, EJAtlas, etc.) offrent une perspective critique, souvent axée sur les risques, les accidents passés et les préoccupations environnementales.2 Les organisations internationales comme l'AIEA et l'OCDE-NEA publient des rapports sur des aspects spécifiques de la sûreté, de la gestion des déchets ou des programmes de coopération.30 Enfin, les archives de presse (World Nuclear News, Nuclear Engineering International, Reuters, agences russes, etc.) couvrent les événements ponctuels, les développements commerciaux ou les aspects géopolitiques.14 L'accès à l'information, les biais potentiels et le focus de chaque type de source varient considérablement. De plus, le statut de ZATO de Seversk agit comme un filtre, limitant intrinsèquement la quantité et la nature des informations qui parviennent au domaine public.7L'héritage de SKhK est lourd, marqué par des accidents significatifs 11 et des pratiques de gestion des déchets historiquement douteuses qui ont laissé un passif environnemental potentiellement important.2 Cet historique crée un risque de base et suscite une méfiance externe qui contraste fortement avec les assurances de sécurité contemporaines fournies par les opérateurs officiels.29 Les événements passés démontrent la possibilité de défaillances graves. Le stockage à long terme des déchets, en particulier par des méthodes comme l'injection profonde ou le stockage en surface potentiellement vulnérable, présente des dangers persistants (fuites, contamination) difficiles à éliminer complètement ou à garantir contre tout incident futur. Les ONG jouent un rôle de veille en soulignant ces risques hérités et les problèmes présumés actuels 3, offrant un contrepoint nécessaire aux récits officiels. La surveillance internationale par l'AIEA semble être principalement réactive (post-accident 1993) ou ciblée sur des programmes spécifiques (MPC&A, garanties sur certaines matières), plutôt qu'une surveillance continue et exhaustive des conditions générales du site ou des risques hérités. L'évaluation de la sécurité actuelle doit donc impérativement tenir compte de cet héritage. Les conditions de travail sont inévitablement influencées par la présence de contamination historique et d'importants inventaires de déchets. Le conflit entre les déclarations officielles et les préoccupations externes, amplifié par l'opacité de la ZATO, rend difficile une évaluation indépendante des risques. Les travailleurs opèrent dans un environnement façonné à la fois par les protocoles actuels et les événements passés.Tableau 5 : Résumé des Incidents/Préoccupations Connus à SKhK
Date/Période |
Type |
Description Sommaire |
Conséquences/Impacts Rapportés |
Type de Source (Exemple) |
6 Avril 1993 |
Accident (Explosion chimique/nucléaire) |
Explosion cuve retraitement, rejet U/Pu/produits fission |
Contamination site (~1500 m²), panache (~120 km²), contamination villages (Georgievka), INES 4, exposition potentielle |
AIEA, ONG, Presse 5 |
14 Août 1961 |
Accident (Criticité) |
Incident de criticité avec uranium |
Dose aiguë (200 rem / 2 Sv) pour 1 travailleur |
Étude accidents 84 |
13 Déc. 1978 |
Accident (Criticité) |
Incident de criticité (détails limités) |
Exposition travailleurs (non quantifiée) |
Étude accidents 84 |
Historique (continu) |
Préoccupation Environnementale |
Injection déchets liquides en profondeur, stockage déchets solides/liquides en surface (bassins, tranchées) |
Risque contamination eaux souterraines/surface (Rivière Tom), contamination sols |
ONG, Études 2 |
Années 2000-2010 (et potentiellement après) |
Préoccupation Environnementale |
Stockage extérieur conteneurs UF6 appauvri ("tails") importés |
Risque fuites, contamination environnementale, critiques sur importation "déchets" |
ONG, Presse 17 |
Continu |
Préoccupation Environnementale |
Rejets chroniques allégués (ex: ~10g Pu/an), fuites potentielles des installations de stockage |
Contamination chronique environnement, exposition potentielle travailleurs/population |
ONG 5 |
Février 2015 |
Accident (Industriel/Radiologique?) |
Incident mineur rapporté (brûlures employé) lié à une nouvelle installation |
Blessure travailleur |
Presse locale (via 21) |
VI. Contexte Comparatif : SKhK et Autres Installations d'Enrichissement
Pour mieux situer les conditions potentielles à SKhK, il est utile de comparer brièvement le site à d'autres installations similaires en Russie et dans le monde, en termes de technologie, de capacité et de contexte réglementaire, tout en reconnaissant les limites de la comparaison directe des conditions de travail.
- A. Comparaison Brève avec d'autres Installations RussesLa Russie exploite trois autres grands centres d'enrichissement de l'uranium, tous utilisant la technologie avancée de centrifugation, comme SKhK.9 Il s'agit de :
- Le Combinat électrochimique de l'Oural (UEKhK) à Novouralsk : C'est la plus grande usine d'enrichissement de Russie et l'une des plus grandes au monde, avec une capacité estimée à environ 10 millions d'UTS/an.9
- L'Usine électrochimique (EKhZ) à Zelenogorsk : Sa capacité est estimée à environ 8,7 millions d'UTS/an, avec des projets d'expansion. Elle abrite également une usine de déconversion de l'UF6 appauvri.9
- Le Combinat chimique et d'électrolyse d'Angarsk (AEKhK) : Sa capacité est d'environ 2,6 millions d'UTS/an. Il exploite également une usine de production d'UF6.9
Par comparaison, la capacité d'enrichissement de SKhK est estimée à environ 3,0 millions d'UTS/an 9, ce qui en fait l'une des plus petites des quatre usines russes en termes de volume d'enrichissement. Cependant, SKhK se distingue par sa spécialisation dans l'enrichissement de l'uranium de retraitement (URT ou RepU) pour des clients étrangers 2, une activité qui requiert des centrifugeuses dédiées.16 De plus, SKhK est un complexe plus intégré que les autres, combinant l'enrichissement avec la conversion d'uranium (production d'UF6) 1, des activités historiques de retraitement, un stockage massif de déchets et des activités de R&D avancées (combustible pour BREST-OD-300).1 Les sites de Novouralsk et Zelenogorsk ont également joué un rôle clé, aux côtés de Seversk, dans le programme américano-russe de dilution de l'UHE ("Megatons to Megawatts").37En termes de sécurité historique, d'autres sites russes partagent un passé difficile. Le complexe de Mayak à Ozersk, en particulier, est tristement célèbre pour l'accident de Kychtym en 1957 (explosion d'une cuve de déchets de haute activité) et pour une contamination environnementale chronique et étendue due à des rejets radioactifs massifs dans la rivière Techa et le lac Karatchaï.95 Mayak a également connu plusieurs accidents de criticité.83 Bien que les données spécifiques sur les conditions de travail actuelles dans ces différentes usines russes fassent défaut pour une comparaison directe, l'historique partagé d'accidents graves et de problèmes environnementaux suggère l'existence de défis systémiques liés à la sécurité et à la gestion des risques pendant l'ère soviétique, dont les conséquences (risques hérités) pourraient persister à travers le complexe nucléaire russe.
- B. Comparaison avec les Pairs Internationaux (ex: Urenco, Orano)Sur le marché mondial de l'enrichissement, les principaux concurrents de Rosatom (via Tenex) sont le consortium Urenco (basé au Royaume-Uni, en Allemagne et aux Pays-Bas, avec également une usine aux États-Unis) et la société française Orano.15 Urenco dispose d'une capacité totale d'environ 17,9 millions d'UTS/an, tandis qu'Orano a une capacité d'environ 7,5 millions d'UTS/an.15 La China National Nuclear Corporation (CNNC) est également un acteur majeur, principalement pour le marché intérieur chinois, avec une capacité estimée à environ 8,9 millions d'UTS/an et en expansion.15 Comme en Russie, ces opérateurs utilisent principalement la technologie de centrifugation.15 Rosatom détient la plus grande capacité globale, estimée à environ 27,1 millions d'UTS/an réparties sur ses quatre sites.15Une différence majeure réside dans l'environnement réglementaire et la transparence. Les installations occidentales opèrent sous des régimes réglementaires différents (par exemple, la Nuclear Regulatory Commission (NRC) aux États-Unis 15, les autorités de sûreté nationales et européennes en Europe). L'information sur la performance en matière de sécurité, les licences d'exploitation et, dans une certaine mesure, les conditions de travail dans les usines d'Urenco ou d'Orano est généralement plus accessible au public via les dossiers réglementaires, les rapports d'entreprise et les communications publiques dans les démocraties occidentales. Cela contraste avec l'opacité relative entourant les installations russes, en particulier celles situées dans des ZATO comme Seversk. Cependant, les extraits fournis ne contiennent pas de données comparatives directes et détaillées sur les conditions de travail (salaires, horaires, taux d'accidents spécifiques comparables, etc.) entre les installations russes et occidentales.Le marché mondial de l'enrichissement est actuellement en pleine mutation. En réponse à la demande croissante et aux efforts des pays occidentaux pour réduire leur dépendance vis-à-vis de l'approvisionnement russe suite à la guerre en Ukraine, Urenco et Orano ont annoncé des plans pour augmenter ou optimiser leurs capacités d'enrichissement.15 Aux États-Unis, des efforts sont également en cours pour relancer une capacité nationale d'enrichissement, y compris pour l'uranium faiblement enrichi à haute teneur (HALEU) nécessaire aux réacteurs avancés, un marché actuellement dominé par la Russie.15 Des technologies alternatives comme l'enrichissement par laser sont également en développement (par exemple, GLE aux États-Unis 15).Bien que les données permettent de comparer la part de marché, la capacité de production et la technologie utilisée par Rosatom/SKhK par rapport à ses concurrents internationaux comme Urenco et Orano 15, il y a une absence quasi totale de données comparables sur les conditions de travail (détails sur la sécurité, les salaires, l'application des droits des travailleurs, les résultats sanitaires) dans les documents consultés. Les informations publiques sur les installations russes, en particulier les ZATO, se concentrent sur les capacités techniques, les rôles stratégiques et les incidents majeurs, et non sur les conditions de travail granulaires. Les informations provenant des entreprises et régulateurs occidentaux, bien que potentiellement plus accessibles, ne sont pas structurées dans les extraits pour permettre une comparaison directe et détaillée des conditions de travail. De plus, les contextes juridiques, réglementaires et culturels différents rendent toute comparaison directe complexe, même si les données étaient disponibles. Les sensibilités commerciales limitent également souvent la divulgation publique des structures de coûts opérationnels détaillées, qui incluent les coûts de main-d'œuvre. Par conséquent, ce rapport peut comparer efficacement la position de SKhK (et de la Russie) sur le marché mondial, mais ne peut pas formuler d'affirmations fondées sur des preuves quant à savoir si ses conditions de travail sont meilleures ou pires que celles de ses pairs internationaux, sur la seule base des documents fournis. La comparaison doit souligner cette asymétrie cruciale des données et se concentrer sur les différences contextuelles (statut ZATO, environnement réglementaire, niveaux de transparence).Tableau 6 : Aperçu de la Capacité Mondiale d'Enrichissement (Estimations Récentes)
Opérateur |
Pays/Sites Clés (Exemples) |
Capacité Estimée (M UTS/an) |
Technologie Principale |
Notes (Exemples) |
Rosatom (Tenex) |
Russie (Novouralsk, Zelenogorsk, Seversk, Angarsk) |
~27.1 15 |
Centrifugation |
Plus grande capacité mondiale; Enrichissement URT (Seversk); Capacité HALEU commerciale 12 |
Urenco |
UK (Capenhurst), Allemagne (Gronau), Pays-Bas (Almelo), USA (NM) |
~17.9 15 |
Centrifugation |
Expansion capacité en cours (USA, Pays-Bas) 15 |
Orano |
France (Tricastin - Georges Besse II) |
~7.5 15 |
Centrifugation |
Étudie possibilités d'expansion 15 |
CNNC |
Chine (Hanzhong, Lanzhou) |
~8.9 (en expansion) 15 |
Centrifugation |
Principalement marché intérieur; Expansion rapide capacité 15 |
Autres |
Japon (JNFL), Brésil (INB), Inde, Pakistan, Iran, Argentine |
~0.1-0.4+ 15 |
Centrifugation/Autres |
Capacités limitées, R&D laser (Argentine), Pilcaniyeu (diffusion gazeuse, Argentine - arrêtée) 15 |
Centrus (USA) |
USA (Piketon, Ohio) |
Démonstration HALEU |
Centrifugation |
Production HALEU (limitée); Anciennement projet commercial (ACP) 15 |
GLE (USA) |
USA (Wilmington, NC - projet) |
Projet |
Laser (SILEX) |
Développement technologie laser 15 |
VII. Conclusion et Évaluation
L'analyse des informations disponibles concernant les conditions de travail au Combinat chimique de Sibérie (SKhK) à Seversk permet de tirer plusieurs conclusions, tout en soulignant les limites importantes des données accessibles.
- A. Résumé des Constatations sur les Conditions de TravailLe SKhK, opéré par TVEL sous l'égide de Rosatom, fonctionne dans le cadre restrictif de la ZATO de Seversk. Les conditions de travail y sont officiellement régies par le droit du travail russe et les politiques de sécurité de Rosatom/TVEL. Cependant, les données spécifiques sur la réalité quotidienne des travailleurs (horaires précis à SKhK, échelles de rémunération, détails de la surveillance médicale actuelle) sont très limitées dans le domaine public. La sécurité est affichée comme une priorité absolue, mais cet engagement officiel doit être mis en balance avec un héritage documenté d'accidents majeurs (explosion de 1993, incidents de criticité) et des préoccupations environnementales persistantes et crédibles (gestion des déchets, contamination alléguée) soulevées par des observateurs externes et confirmées en partie par des actions en justice passées. Ces facteurs environnementaux et historiques constituent des risques latents pour les travailleurs. Des études épidémiologiques menées sur des cohortes de longue date indiquent des risques sanitaires accrus liés aux expositions professionnelles passées, notamment pour les maladies cardiovasculaires et potentiellement certains cancers, bien que la recherche se poursuive pour clarifier ces liens.
- B. Évaluation de la Transparence et de la Disponibilité des DonnéesL'évaluation est significativement entravée par le manque de transparence. Le statut de ZATO de Seversk limite drastiquement l'accès physique et informationnel pour les observateurs indépendants (chercheurs, journalistes, ONG). S'ajoute à cela l'opacité générale qui entoure les installations nucléaires sensibles en Russie. Il existe une disparité notable entre les informations disponibles : les rapports officiels mettent en avant la conformité et les succès ; les études scientifiques offrent des éclairages spécifiques mais souvent rétrospectifs ; les rapports d'ONG fournissent une critique externe essentielle mais parfois difficile à vérifier de manière indépendante. Cette situation contraste avec les environnements réglementaires potentiellement plus transparents des pays occidentaux, où davantage d'informations opérationnelles et de sécurité peuvent être accessibles au public. La vérification indépendante des conditions réelles à SKhK reste donc extrêmement difficile.
- C. Risques Clés et Zones d'IncertitudeLes principaux risques identifiés pour les travailleurs de SKhK comprennent :
- Les dangers radiologiques et chimiques inhérents aux opérations actuelles (enrichissement, conversion, manipulation de matières nucléaires et chimiques).
- Les risques liés à l'héritage du site : contamination résiduelle, intégrité à long terme des vastes installations de stockage de déchets (notamment ceux injectés en profondeur ou stockés en surface).
- Le potentiel de futurs accidents, malgré l'amélioration présumée des protocoles, en raison de la complexité des processus et de l'âge de certaines infrastructures.
- Les effets sanitaires à long terme des expositions chroniques passées et actuelles.
- Les impacts psychosociaux potentiels liés au travail dans un environnement fermé, à haut risque et soumis à une culture du secret.
Les principales zones d'incertitude concernent l'efficacité réelle et la mise en œuvre quotidienne de la culture de sécurité promue par l'entreprise, les détails précis des conditions de travail actuelles (rémunération, horaires, relations sociales), l'état exact et la sûreté à long terme des sites de stockage de déchets, et l'étendue complète des impacts sanitaires sur les cohortes de travailleurs actuelles et passées.
- D. Remarques Finales sur la Culture de Sécurité et les Pratiques de TravailSur la base exclusive des éléments fournis, une évaluation nuancée s'impose. Il existe un cadre formel pour la sécurité et les droits du travail à SKhK, défini par la législation russe et les politiques de Rosatom/TVEL. Des systèmes de gestion de la sécurité, de formation et de suivi dosimétrique sont en place. Cependant, ce cadre formel est confronté à un historique de sécurité problématique, à des préoccupations environnementales crédibles et persistantes qui impactent directement l'environnement de travail, à des études sanitaires indiquant des risques à long terme, et à une opacité structurelle qui empêche une évaluation indépendante complète. Le fossé entre les déclarations officielles et les preuves externes ou historiques suggère une réalité complexe. Bien que des améliorations aient pu être apportées, les risques hérités et le manque de transparence constituent des défis permanents pour garantir et vérifier des conditions de travail et une sécurité optimales au Combinat chimique de Sibérie. L'évaluation finale reste donc empreinte d'incertitude quant à l'expérience vécue par les travailleurs au quotidien.
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